Italie : Tout comprendre au procès XXL de la mafia calabraise dont le verdict est attendu ce lundi
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Plus de 5.000 années de réclusion requises, 322 accusés… Les chiffres du maxi-procès de membres présumés de la puissante mafia italienne ‘Ndrangheta sont hors normes. La justice italienne rend ce lundi son verdict dans cette affaire visant des petites mains et parrains de la pieuvre calabraise, ainsi que leurs complices en col blanc, fonctionnaires, élus locaux et même policiers de haut rang. Pour tout comprendre à ce procès visant plus de 300 personnes, on vous fait un récap.
• Qu’est-ce que la ‘Ndrangheta ?
Longtemps sous-estimée, la ‘Ndrangheta s’est développée discrètement durant des décennies alors que les autorités concentraient leurs efforts sur Cosa Nostra, la mafia sicilienne décrite dans des films comme Le Parrain. Basée en Calabre, une région très pauvre située dans la pointe de la Botte italienne, la ‘Ndrangheta est la plus riche et la plus puissante des mafias italiennes, devant Cosa Nostra en Sicile et la Camorra napolitaine. Présente dans une quarantaine de pays, elle exerce sur sa terre d’origine une emprise étouffante, infiltrant et corrompant l’administration tout en faisant régner sa loi de fer sur la population. Aujourd’hui, les experts estiment que la ‘Ndrangheta, composée d’environ 150 familles calabraises, réalise un chiffre d’affaires annuel d’une cinquantaine de milliards d’euros à travers le monde.
• Comment l’Italie a-t-elle réussi à mettre en place un tel procès ?
Avec l’aide d’Interpol, l’Italie est parvenue ces dernières années à resserrer son étau sur le réseau criminel, entraînant les polices du monde entier à reconnaître les activités de la ‘Ndrangheta sur leur territoire et à s’y attaquer. Depuis janvier 2021, trois juges ont auditionné durant des milliers d’heures des témoins, parmi lesquels une cinquantaine de mafieux repentis devenus collaborateurs de justice, sur les activités de la famille Mancuso et de ses associés, un important clan de la ‘Ndrangheta contrôlant la province de Vibo Valentia.
• Qui sont les accusés et quels sont les chefs d’accusation ?
• En tout, 322 membres de la mafia sont accusés. Parmi eux, des petites mains et parrains de la ‘Ndrangheta mais aussi leurs complices en col blanc, fonctionnaires, élus locaux et même policiers de haut rang. Illustrant l’infiltration de la mafia calabraise dans l’économie légale, des gérants de société, des maires et des fonctionnaires, y compris un policier de haut rang, figurent également sur le banc des accusés. L’un des plus connus est un avocat de 70 ans, Giancarlo Pittelli, ex-député et sénateur du parti Forza Italia de Silvio Berlusconi, qui encourt dix-sept ans de prison pour son rôle présumé d’intermédiaire entre le clan et le monde politique. Les chefs d’accusation sont nombreux : association mafieuse, trafic de drogue, extorsion, usureEn quoi a consisté le procès ?
Ce maxi-procès organisé dans un bunker sous haute surveillance dans la ville de Lamezia Terme est le plus important contre la mafia depuis plus de trente ans. Au cours du procès, les accusés ont détaillé le fonctionnement violent de la ‘Ndrangheta, son emprise sur la population locale, l’extorsion, le trucage des appels d’offres et des élections, l’acquisition d’armes, etc. Ils ont révélé des secrets sur des caches d’armes dans des cimetières ou des ambulances servant au transport de drogues, et dévoilé comment l’eau municipale était détournée pour arroser des plantations de marijuana.
Ceux qui s’opposent à la mafia sont menacés, voire éliminés. Ils découvrent sur le seuil de leur porte des chiots morts ou des têtes de chèvre ou même de dauphin. Sans parler des voitures incendiées ou des devantures de magasins saccagées. Certains sont aussi passés à tabac ou visés par des tirs, d’autres disparaissent à jamais.
• Quelles seront les suites ?
En dépit de son envergure et des 5.000 années de réclusion requises, ce procès ne devrait pas bouleverser les activités de la ‘Ndrangheta, selon les experts. « Je ne crois pas qu’une opération de police suffise à détruire la ‘Ndrangheta », estime ainsi Antonio Nicaso, qui met en avant d’autres priorités : emploi, éducation et changement des mentalités. « C’est de cela dont on a besoin pour attaquer une organisation criminelle ».
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